Les jeux d’amoureux : pourquoi c’est souvent décevant
Si vous êtes joueur, vous savez de quoi je parle. Si par contre vous êtes débutant, ou juste curieux, ou qu’on vient de vous offrir un Love dice, un Strip quizz, ou un In love, vous êtes probablement impatient, curieux ou un peu sceptique. C’est normal.
Les jeux coquins, on en connaît tous. Ça va du jeu de gages, aux questions osées en passant par les dés d’actions. On les trouve étalés à côté des blagues potaches sur t-shirt et des mugs de “Bonne retraite !” chez Expo. Pour beaucoup, ces jeux servent à “pimenter” la vie de couple. Précisément. Donc on se les offre parce qu’on s’ennuie ou au contraire, parce qu’on voudrait s’amuser encore plus ! Le problème c’est qu’ils sont souvent décevants. Pourquoi ? Parce qu’ils ratent leur cible.
Ces jeux se destinent à un public qui… des joueurs que… des couples qui… en fait, ces jeux n’ont pas d’autre but que d’être vendus à un maximum de personnes sans vraiment développer d’aspects ludiques.
Attention, des généralités se sont glissées dans ce texte, sauras-tu les retrouver ?
Le jeu érotique a deux objectifs. Briser la glace et passer à l’acte.
Le jeu qui sert à briser la glace partira du principe que les joueurs ne sont pas forcément un couple et qu’il va falloir instiller une atmosphère propice au dérapage. Donc on le retrouvera souvent sous forme d’action ou vérité, de jeux de hasard à base de gages ou de jeux à boire. La constante « hasard » a ici une importance capitale, puisque c’est ce qui va amener les joueurs à se rapprocher, tout en se déresponsabilisant.
C’est pas moi, c’est le dé.
C’est une mécanique intelligente, car la timidité est le premier frein dans ce type de jeu, mais c’est, paradoxalement ce qui va faire du jeu un échec.
En effet, puisque le hasard est aveugle, il ne prend pas en compte les différentes sensibilités des joueurs, ni leurs limites. Ce qui amène à des situations embarrassantes parce le jeu (et le mode « défi » inhérent à ce type de jeu) va pousser certains joueurs à la surenchère, tandis que d’autres seront totalement rebutés par l’idée d’obligation. Qu’elle soit explicite (les règles) ou implicite (l’ambiance).
Il est nécessaire de permettre aux joueurs de se rétracter afin de ne pas créer de malaise. C’est ici qu’interviennent les jokers.
Non, vous n’embrasserez pas machin !
Non, vous n’avez pas envie de détailler votre pire expérience sexuelle !
Si vous le faisiez contre votre gré, au mieux vous avez réalisé le défi, au pire vous vous sentez mal.
Ce type de jeu, s’il est paramétré au préalable en accord avec les attentes de chacun, peut avoir un potentiel de « fun » assez important, si les joueurs sont tous d’accord sur le principe de “non-obligation”.
Mais parlons maintenant des jeux où on « passe à l’acte ».
Ce sont principalement ceux là qui posent question quant à leur potentiel ludique. En effet, on se retrouve de nouveau dans un mode de jeu où le hasard et le défi vont tenir une place importante. Les mécanismes sont souvent pauvres et prétextes à imposer des actions aux participants.
partenaire (sexuel) ou un adversaire (ludique) ?
Exemple : les « love dice » qui proposent un dé action : embrasser, toucher, masser… Et un dé corps : bouche, seins, pieds,…
De par leur nature, ils laissent peu de place à l’imaginaire et le défi est biaisé puisque les participants sont (souvent) deux et ne peuvent être soumis à un quelconque système d’appréciation extérieure. On constate, en effet, que la quasi totalité des jeux de couple sont compétitifs. Si le couple n’est pas « bon joueur », l’idée de se faire évaluer par son adversaire peut avoir un côté désagréable. Sans parler du fait de catégoriser son partenaire (sexuel) comme un adversaire (ludique).
L’autre point problématique de ce type de jeu, c’est le niveau de coquinerie qui ne peut évidemment pas correspondre aux attentes d’un couple. Soit les gages et défis sont trop ordinaires, et on ressort avec un sentiment d’ennui, soit les actions sortent du cadre et virent dans le graveleux. On en revient au sentiment de malaise qui peut bloquer complètement les joueurs et donc faire avorter une partie.
Le timing est aussi un des paramètres tellement sensible qu’il est difficile de coller.
Quand le jeu veut vous amener progressivement à un état propice aux échanges amoureux mais que la tension ne monte pas, on peut se retrouver “forcé” de jouer dans un mode qui va trop vite.
Pas besoin de vous faire un dessin. Quand monsieur refuse catégoriquement de se déshabiller et ce, même si le jeu exige à ce moment là, on se retrouve plus facilement à discuter de la mauvaise volonté du joueur que se dévorer du regard.
A l’inverse, quand le jeu fait son effet un peu trop efficacement, on finit très vite par oublier qu’on était en train de jouer pour partir batifoler. On se demande après quel était l’intérêt du jeu. On ne se souvient même pas des règles. Le timing est tellement difficile à contrôler que le jeu n’est plus en adéquation avec l’ambiance. Dans ce sens, il existe des jeux qui n’imposent pas d’actions directes et trop osées aux participants, mais plutôt des petits défis faciles qui permettront de gagner des récompenses.
Souvent à côté de la plaque ?
Je ne vais pas prétendre que tous les jeux estampillés “jeux de couples” sont mauvais.
Ils sont juste souvent à côté de la plaque, parce qu’il sont conçus dans l’idée qu’il faudra les vendre à un public le plus large possible. A cause de ça, on se retrouve souvent avec des créations qui n’ont aucune originalité mais qui se prétendent aptes à “pimenter” une soirée. D’innombrables copier/coller du trivial poursuit, du jeu de la bouteille ou des dés amoureux.
A mon sens, le meilleur moyen de ne pas se gâcher une soirée, c’est de choisir soigneusement le jeu qui collera à l’ambiance désirée, de ne jamais s’obliger à quoique ce soit (en n’hésitant pas à trancher dans les règles et à se permettre un joker, par exemple) et en se rendant à l’évidence, on n’est pas devant la création ludique du siècle, mais ce qu’on cherche ici, avant tout, c’est un agréable moment à deux.
Illustration : Diane Brison – diane.illustrateur.org
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